Débarrassé de mes câbles et tuyaux, sauf du contrôle cardiaque, j'ai un peu mieux dormi.
Lundi matin, les choses commencent à s'organiser en vue de mon départ du service de soins intensifs pour celui de chirurgie. Le kiné passe, me fait un peu travailler, puis me conseille d'une part de continuer les exercices, d'autre part de marcher. Problème : marcher ne convient pas à mes lombaires...
Quelques heures plus tard, toutes mes affaires réunies sur mon lit, me voilà convoyé vers ma nouvelle chambre au troisième étage, avec la même vue que précédemment sur les monts d'Ardèche.
C'est avec un gros pincement au cœur et la larme à l’œil que je quitte le personnel soignant du service de soins intensifs, auquel je rends ici un hommage appuyé ! Compétence, gentillesse, attention, respect et j'en passe. Ce sont de vrai(e)s professionnel(le)s !
La seule chose dont je me sois plaint pendant ces dix premiers jours, c'est le contenu des plateau repas ! Autant ce qui était frais, notamment fromage et desserts, arrivait à passer, autant les plats chauds me donnaient la nausée ! Le potage du soir portait chaque soir un nom différent, mais il était toujours aussi insipide. Un soir, un steak haché, probablement appétissant à la sortie de la cuisine, est arrivé tellement recuit par son séjour dans le chariot chauffant qu'il était immangeable ; idem un autre jour avec une portion de poisson pané. Très rapidement, je n'ai donc plus mangé qu'une partie de l'entrée froide si elle m'attirait un peu, puis fromage et/ou desserts.
Le premier repas du soir dans ce nouveau service n'a pas dérogé. Par contre, ayant opté pour la formule "Solo +", chambre particulière avec télévision et Wifi, uniquement proposée dans le service et pas aux soins intensifs, j'avais maintenant droit au petit déjeuner "plaisir" : pain, beurre, confiture, miel, yaourt nature, café (qui m'a paru un peu moins insipide que précédemment), jus d'orange et croissant bien croustillant ! Ça fait du bien au moral, même si ça ne fait pas oublier le reste !
Les autres repas, midi comme soir, ne changent pas : seul le froid arrive plus ou moins à passer. À mon retour, la balance a prétendu que j'avais perdu 4 kg !!! Remarquez, j'en ai encore un petit stock d'avance... Je contrôlerai un de ces jours.
Problème dans ce service : si la surveillance est nettement allégée, je n'ai plus aucune prise en charge de kinésithérapie, je dois me débrouiller seul. Mon fauteuil, peu confortable, est situé côté fenêtre, le téléphone sur la table de nuit, côté porte. Je dois donc faire le tour du lit, sans me presser, lorsque mon épouse m'appelle. Il me faut alors m'allonger pour reprendre mon souffle, et parler m'essouffle aussi...
Mes hallucinations visuelles s'améliorent lentement, mais j'ai beaucoup de mal à rester concentré sur ma lecture. Moi qui pensais être capable de lire un livre par jour, comme lors de la précédente hospitalisation pour la ponction, je n'ai pu finir le premier livre que la veille de mon départ !
La radio pulmonaire et le bilan biologique faits en début de semaine satisfont le chirurgien. Le seul traitement est la piqûre d'anticoagulant chaque matin... Il n'y a rien que je ne puisse faire à la maison, je commence à bouillir ! Je m'ennuie à mourir, j'ai énormément de mal à lire, abandonnant au bout de trois ou quatre pages, je n'ai aucune envie d'écouter de la musique, j'allume le téléviseur sans vraiment m'intéresser à ce qui s'y passe, j'ai toujours mal aux fesses et une envie folle de rentrer chez moi.
Mardi soir, vers 21 heures, le chirurgien est passé, nous avons rapidement discuté, je lui ai rappelé que je n'ai pas l'intention d'aller en maison de convalescence à Dieulefit, il m'a dit que nous parlerions le lendemain de ma sortie en fin de semaine, mais aucune décision n'était encore prise.
Mercredi dans l'après-midi, l'infirmier m'a annoncé qu'une place à Dieulefit m'était réservée pour mardi prochain ! Je lui rappelle que j'ai dit et redit que je n'irai pas, et que je ne comprends pas pourquoi on a demandé cette place, que j'en parlerai au chirurgien quand il passerait le soir. Mais je l'ai attendu en vain ! Trop occupé certainement par ses interventions et consultations, il ne passe pas.
Jeudi matin, je craque ! Je demande à l'infirmier d'informer le chirurgien que, avec ou sans son accord, je sortirai vendredi, car je ne supporte plus d'être enfermé dans cette chambre, à me morfondre sans soins ni surveillance particuliers. L'infirmier transmet à la secrétaire du chirurgien. J'espère qu'il passera, mais une fois de plus, je ne le vois pas. Je suis pourtant resté réveillé jusqu'à plus de 22 h 30 ce soir-là, à espérer pouvoir m'expliquer avec lui. Un emploi du temps trop chargé, encore.
Vendredi matin, j'en reparle à l'infirmière. Le chirurgien est de nouveau alerté, mais je demande à signer une décharge pour partir au plus tôt. Elle me dit qu'elle m'apportera le document à signer vers midi. Je prépare mes affaires. Vers midi, le chirurgien arrive, m'assure être passé mercredi pour me signifier ma sortie pour samedi matin, et qu'il a travaillé trop tard jeudi pour pouvoir passer. Je lui rétorque que je ne l'ai pas vu mercredi. Pour preuve, j'ai un message envoyé à mon épouse jeudi matin tôt où je me plains justement de ne pas l'avoir vu ! Il me propose de sortir samedi matin. J'accepte, même si passer une journée de plus en clinique me semble insupportable... J'informe mon épouse et je lui demande de ne pas venir ce vendredi, pour lui éviter deux nouvelles heures de route.
Un peu rasséréné, j'arrive enfin à finir "Jean Le Bleu" de Giono et à attaquer "Debout les morts" de Fred Vargas, à regarder un peu la télé, à passer du lit au fauteuil et du fauteuil au lit... Le soir, le chirurgien passe, je le branche sur le Rallye Monte-Carlo qu'il a fait plusieurs fois, puis nous parlons de l'organisation de son travail et de celui de ses associés, l'un d'eux venant de prendre sa retraite. Nous ne parlons même pas de mon état ; il repassera demain pour me donner le feu vert et les ordonnances pour les soins à faire à mon retour à la maison : piqûres d'anticoagulant, contrôles sanguins, pansements, ablation des agrafes...
Vers 21 h 30, je dois déjà dormir, impatient de rentrer chez moi !